novembre 23, 2009

La pudeur n'est plus de ce monde


Vous avez remarqué comme, dans le train, les gens parlent de métastases et de "Combien de temps lui reste-t-il ?"
Bon, ok, j'exagère. Mais à peine.
Jeudi soir, dans le train, une jeune fille demandait "Mais alors... il ne va pas s'en sortir ?" puis "Bon, s'il est encore là dimanche, je viendrais le voir".
Le climat dans les parages, je ne vous dis que ça. Entre le mec en face d'elle qui ne savait plus où poser les yeux et a fini par les mettre dans sa sacoche, la femme vaguement intriguée qui a fini par ôter son écouteur et moi qui envoyais un mail de mon portable, tellement je trouvais cette situation incongrue... Bon, il s'est rapidement avéré que son grand-père mourant était en fait un chien. Et que le prix de la piqûre lui a fait vraiment regretter qu'il faille en passer par là "Combien ? Quatre-vingt euros ?!"

Samedi, à la bibliothèque, je vais gentiment travailler, la personne en charge de la salle d'étude est au téléphone. Elle y reste vingt minutes. Oubliant complètement qu'il y a là des gens venus chercher le silence, la tranquillité, la concentration. Les innocents !
Et de raconter sa vie, avec force rires de gorge et exclamations. Incroyable. Je peux tout vous raconter. D'autre part, on ne sait jamais qui est autour de nous. Il s'avère qu'elle parlait de personnes que je connais, de près, très près, ou de plus loin.

D'autres personnes, dès le saut du lit, parlent déjà du repas qu'ils feront le soir, et que vous le vouliez ou non, vous êtes rapidement informé du contenu de leur bac à légumes à 8h34, alors même que vous vous laissiez gentiment emporter par votre bouquin.

Ce soir en rentrant, cette femme, au téléphone toujours "Mais bon, faut d'abord savoir si c'est métastasé ou pas métastasé..." Oui, soyons un peu pragmatiques, que diable !

Pas de repos pour les braves, la vie est là, qui ne demande qu'à être vécue et à être dite, alors n'hésitons plus, étalons, racontons, à tous vents, à tout va, nos carottes, nos métastases, nos envies, nos pourquoi et nos comment. La liberté d'expression s'exerce à chaque instant, ne soyons pas avares. Et tant pis pour nos voisins s'ils ne voulaient pas savoir.
Ils n'avaient qu'à prendre leur bagnole.
J'ai l'air de râler, mais pas du tout. Moi, les gens qui racontent leur vie, ça me distrait. D'autant que je ne suis pas la dernière à le faire, j'avoue tout. De là à étaler l'intérieur de mon frigo...

Et vous ?

ah... le silence des bois...


7 commentaires:

  1. Avant, dans les transports, je mettais un casque parce que le silence me cassait les pieds. Non c'est vrai quoi, tous ces gens qui se regardaient les pieds pour ne surtout pas entrer en communication même avec un coup d'oeil avec un "autre" quel qu'il soit...
    Aujourd'hui, je ressors mon casque (de bien meilleure qualité, j'ai les tympans sensibles) parce que je n'en peux plus de devoir subir les vies pleins de trous débitées à un niveau sonore proche de l'avion au décollage.
    Ce n'est pas que j'ai particulièrement envie d'écouter de la musique dans les transports (je connais de meilleures conditions pour ce faire), c'est surtout que je ne peux rien faire d'autre qu'écouter ces morceaux d'intimité dont je n'ai strictement rien à faire. Impossible de lire, ni de griffonner ne serait-ce qu'une liste de course dans un carnet. Je n'arrive plus à penser du tout, les mots de l'autre envahissent complètement ma tête.
    Si au moins je pouvais en faire un texte, façon "brève de comptoir"... mais il manque la moitié de l'histoire puisqu'on ne connait pas les réponses que reçoit le téléphoniste.
    En fait c'est comme si on me forçait à lire Gali ou Voiçà alors que je ne peux pas fermer les yeux... dans le fond, c'est assez violent quand même...

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  2. J'aime bien écouter, cela m'a permis d'en faire un bout de livre. Mais c'que je préfère, c'est regarder. Ca laisse plus de place à l'imagination. Et pour rêvasser, j'rêvasse... Pfiouu !

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  3. Je suis comme LVE... j'aime écouter... et souvent, je m'amuse à combler les trous... j'invente ce que je n'entends pas et que pourrait dire l'interlocuter... en rêvant que je mets tout ça dans un bouquin un jour...

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  4. La Trollette : j'ai un copain qui m'a conseillé de tendre ostensiblement l'oreille vers la personne au téléphone, avec un grand sourire. Radical, paraît-il.

    LVE : Moi j'aime pas être forcée à écouter. Mais des fois, j'avoue que c'est drôle. Quant à regarder, ça aide, quand on écrit, de décortiquer un peu les physiques, de noter des détails.

    chrichrine : tu es balèze dis donc, je connais quelqu'un qui invente les vies des gens aussi. ça peut être très drôle d'imaginer une conversation complètement ubuesque !

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  5. erzébeth8:31 PM

    Notre époque dérive de plus en plus vers l'impudeur, et ça me confirme mon rejet du téléphone, je déteste ça - raconter des bribes de ma vie en public, non merci. Même dans la rue, je ne peux pas.
    Ta "bibliothécaire", là, me hérisse. Pour te venger, tu aurais pu aussi sortir un truc à manger, faire du bruit avec l'emballage, ou prendre une bouteille d'eau, et si elle t'avait fait une quelconque remarque, tu lui aurais fait comprendre qu'elle était la première fautive.

    Ma curiosité étant fortement aiguisée, j'écoute parfois les conversations quand elles peuvent avoir un intérêt pour moi (intérêt poétique, distractif, etc). Mais je garde la plupart du temps les écouteurs vissés sur mes oreilles, parce que j'en ai marre d'être polluée par l'indiscrétion des gens.

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  6. J'avoue, je raconte mais je garde des choses essentielles..... tout en parlant de moi a longueur de blog, je conserve une certaine discrétion. Je deteste me sentir écoutée au restaurant et je déteste ceux qui étalent tres fort !

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  7. erzébeth ; j'ai failli... j'ai failli retourner à la bibli cet aprèm avec des chips et du coca pour compulser les archives et les beaux livres.
    J'aurais adoré qu'elle vienne me faire une remarque.

    Miss Zen : oui, moi aussi, j'avoue. Mais je déteste subir ou faire subir du personnel, du douloureux ou du franchement dramatique. C'est hors de question.

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