décembre 24, 2009

Une blanche neige à redécouvrir

Hier je suis allée voir le ballet de Preljocaj à Chaillot.

C'était magnifique. La chorégraphie, les costumes (Mister Gaultier), la mise en scène, mon dieu ! Cela faisait une éternité que je n'avais pas assisté à un ballet, et quel retour, vraiment. je vous le conseille, même si les places semblent difficiles à obtenir.
Je crois qu'à part un ou deux passages un peu longs au début, j'ai tout adoré. L'ouverture en forme de coup de poing m'a laissée ko, la marâtre en maîtresse dominatrice était sublime, les nains, plutôt des mineurs que des nains à la Walt Disney et leur chorégraphie verticale, les duo boulversants entre blanche neige et la reine, celui avec le prince, non vraiment, c'était sublime.

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Attention en revanche, les enfants ne sont pas les destinataires, certains passages étant vraiment difficiles et très bien rendus...

Voici une belle manière d'entrer en période de fêtes. Je vous souhaite de très beaux moments et je vous dis en 2010.
Vous pouvez en découvrir un extrait ici:








Je vous souhaite de très très belles fêtes !


Chorégraphie : Angelin Preljocaj
Musique : Gustav Mahler
Musique additionnelle : 79 D
Costumes : Jean Paul Gaultier
Décors : Thierry Leproust
Lumières : Patrick Riou assisté de Cécile Giovansili et Sébastien Dué
Assistant, adjoint à la direction artistique : Youri Van den Bosch
Assistante répétitrice : Claudia De Smet
Choréologue : Dany Lévêque
Conseiller acrobaties verticales : Alexandre del Perugia
Spectacle créé en résidence au Grand Théatre de Provence (Aix-en-Provence)
Coproduction Biennale de la danse de Lyon / Conseil Général du Rhône, Théâtre National de Chaillot, Grand Théâtre de Provence, Staatsballet Berlin (Allemagne)
Chorégraphie primée aux Globes de Cristal 2009.

décembre 21, 2009

"C'est une jungle, nous sommes pris dans une jungle"



Il faut quand même que je vous parle de Suite française, que je viens de finir, et qui m'a semblé tout à fait intéressant, agréable et sympathique.
Je découvre avec lui cette femme romancière, Irène Némirovsky, originaire d'Ukraine mais de langue française, dont le talent pour raconter les gens, petits et grands m'a souvent agréablement surprise.

Le roman n'est pas achevé, mais qu'à cela ne tienne, il représente en réalité la réunion des deux premiers tomes prévus pour être initialement les deux premiers tomes d'une série de cinq. L'auteur nous installe suffisamment bien dans l'époque, et peint des personnages aux mille détails parlants, de sorte que chacune des deux parties s'ouvre sur une suivante, mais qu'elles sont parfaitement équilibrée et achevées en elles-mêmes. Le témoignage est écrit sur le vif, Irène Némirovsky ayant assisté à cet exode, même si elle-même n'a pas quitté la région parisienne. Le tableau de l'époque et les figures décrites sont excessivement justes, et les portraits sont amusants autant qu'acerbes. L'ensemble forme une fresque de belle ampleur, qui ne s'essouffle pas et compte un certain nombre d'extraits aussi riches que parlants. Quant aux métaphores, elles sont à la fois poétiques et très expressives.

La première partie, Tempête en juin, décrit l'exode de juin 1940, où les Français fuient les allemands arrivés dans le Nord de la France et entrés dans Paris le 14 juin.
Chaque chapitre donne lieu à la présentation d'un ou de plusieurs personnages, chacun très finement dépeint grâce à l'art du détail et le sens critique de l'auteur. On sent un certain cynisme en même temps que de l'attachement pour certain (peu) d'entre eux. La critique de la société est féroce : en prenant chaque personnage dans son milieu et en le jetant sur les routes en temps de guerre, Irène Némirovsky a là matière à mettre en exergue chaque défaut, chaque
caractéristiques d'une classe sociale, d'une typologie de personnages : des grands bourgeois à l'auteur égoïste, des gens modestes au collectionneur de faïences, elle nous offre un regard perçant et sans complaisance sur les hommes. Par exemple, sur le bord de la route, la mère de famille bourgeoise partagera généreusement les vivres emportés avec les enfants d'une famille dans un café, accomplissant par là même ses bonnes oeuvres, mais elle leur retirera le pain de la bouche sitôt qu'elle aura pris la mesure du dénuement dans lequel l'exode place chacun.

La seconde partie, Dolce, s'arrête dans un petit village, Bussy, et décrit quelques mois de la vie quotidienne des villageois qui ont accueilli les Allemands dans leurs murs. Une relation se tisse plus particulièrement entre une jeune femme et un officier allemand.

Les dernières parties auraient pu/dû s'appeler 3) Captivité ; 4) Batailles 5) La paix, mais les titres n'étaient pas fixés, pas plus que le titre de l'ensemble, pour lequel elle avait envisagé Tempête ou Tempêtes. Le titre de Suite française étant donné finalement en référence à la musique, dont elle se sentait proche, la suite musicale étant un ensemble d'airs musicaux de même tonalité mais aux rythmes différents.

L'auteur ne terminera pas sa fresque, arrêtée le 13 juillet 42, elle est déportée à Auschwitz où elle meurt du typhus le 19 août.

Ce roman posthume a également une histoire. Légué à ses deux filles, le manuscrit est demeuré enfermé de longues années après la disparition de son auteur. Une de ses deux filles le lira finalement en 1998, et il sera publié en 2004 par les éditions Denoël. Il recevra le prix Renaudot la même année.

Suite française, Irène Némirovsky, éditions Denoël, 09/2004. Existe également en version Poche chez Folio.

décembre 18, 2009

Hier encore

Hier j'ai présenté le synopsis de mon roman.
On m'a posé plein de questions.
Des auxquelles je savais répondre, des auxquelles je ne m'attendais pas, des qui m'ont interpelées, et des qui m'entraînaient sur un chemin que je refusais de suivre.
Hier j'ai présenté un plan, mes idées, mes projets.

C'est encore assez lâche, c'est encore un peu flou, mais en plissant bien les yeux je vois la silhouette de mon roman se dessiner au loin.
C'est amusant et un peu émouvant.
Certains personnages se laissent capturer sans rechigner, d'autres jouent à cache-cache avec moi, mais ils ne gagneront pas la partie, foi de moi.

Avant-hier, j'avais des doutes.
Hier j'ai confié le résultat de mon travail.
Aujourd'hui j'ai envie d'avancer encore plus vite, encore mieux.
Et Demain ?

décembre 17, 2009

Petit bilan pré-fêtes de fin d'année

Bien.
Nous sommes donc le 17 décembre.
Attendu que j'ai un travail et un patron pointilleux sur les horaires ;
Attendu que les RTT n'existe pas dans son monde ;
Attendu que je ne vais pas poser de congés sans solde pour aller faire mes cadeaux de Noël ;
Attendu que je n'ai plus de temps libre pendant le we puisque j'ai des rendez-vous familiaux incontournables ;
Attendu que même les histoires de calendrier de l'Avent du soir ont sauté tant on manque de temps le soir...

J'en conclue que je vais devoir aller faire mes achats la nuit.
Ou au petit matin.
En même temps, je devrais être dispensée de la foule.
ça tombe bien, je ne suis pas fatiguée.


Et vous ? C'est fait ? C'est quoi votre meilleure idée de cadeau ?

décembre 11, 2009

La femme à gouaille


Cette femme-là est une femme qui a souffert et souffre encore. Derrière son armure en acier trempé de larmes peut-être, c'est une femme rompue qui se cache en se dévoilant comme personne.

Forte en gueule, elle a toujours un bon mot, une plaisanterie, une remarque à faire. Si elle prend la parole avec aisance, elle la coupe plus souvent qu'à son tour et laisse quelquefois entendre, dans les discours délicats, une faiblesse d'élocution que l'on soupçonne être le vestige d'une dyslexie juvénile.


On l'entend venir de loin, si ce n'est par la force de voix ou de son rire qu'elle a gras et puissant, c'est par le bruit de ses talons, tantôt aiguilles tantôt massifs selon le style choisi pour sa tenue, selon son combat du jour.

Elle grossit et maigrit par période, soumise à de violents caprices hormonaux. Des variations qui ne s'appliquent pas qu'à sa corpulence mais aussi à son humeur. Cassante elle devient méchante, aimante elle devient collante, gluante pour ceux qu'elle chérit.

C'est une femme compréhensive, qui vous entend sans montrer une seconde qu'elle vous écoute, vous comprend alors que vous n'avez pas fini votre phrase. Mais elle entend vraiment, et sa compréhension peut même dépasser vos espérances...

Non dénuée d'intelligence et répète souvent qu'à l'âge qu'elle a, elle se connaît. Mais accepterait-elle ses fêlures que, loin de la fragiliser, cela lui donnerait la capacité de les combler et de les dépasser. Ce sont des gouffres.

La femme à gouaille à un caractère bulldozer. Elle sait ce qu'elle veut, et elle sait l'imposer.
Travailler avec elle n'est pas une sinécure, même si c'est un bon apprentissage : il faut la suivre, elle se comprend.

La femme à gouaille n'est pas méchante, elle est simplement ambitieuse et amoureuse.
Au point d'en être aveugle, obnubilée et obsédée. Et dans le boulot ce n'est pas souhaitable, pour personne. Mais de nous tous, c'est certainement elle qui en souffre le plus.

décembre 09, 2009

Les signes existent (encore faut-il les voir... et y croire!)

Cette semaine, je traînais mon découragement, ma fatigue et mes questions existentielles du we au sujet de mon roman quand j'ai reçu quelques signes des plus encourageants.
Des signes clairs, nets et précis, qui auraient difficilement pu être plus explicites.

Ainsi, alors même que lundi matin je ne voyais pas bien comment j'aurais pu écrire sur l'enfance d'une enfant pendant la seconde guerre (qui ne soit pas Anne Frank), je suis littéralement tombée sur un bouquin intitulé "Journal d'un enfant pendant la guerre".
ça sèche non ?

Et mardi, alors que je me demandais encore comment rendre compte fidèlement du Paris des années 50, un mail est directement arrivé dans ma boîte, me proposant de consulter le fonds de Roger Violet... Une tonne et demi de photos, dont trois quintaux du Paris des années 50.
Autant dire une manne.

Alors bien sûr, ce sont des coïncidences, et bien sûr, je suis à l'affût de tout ce qui pourrait me servir à écrire ce livre mais quand même, bande de septiques, avouez que ce sont de sacrés signes, non ?

Et vous, les signes ? Vous en voyez ? Vous y croyez ? Et qu'en faites-vous ?

décembre 04, 2009

la vie est parfois lisse, hélas


Il y a des périodes où vous êtes fatigué. Vous sentez que vous n'en pouvez plus, vous tirez sur la corde, mais vous ne voulez surtout pas vous arrêter : vous avez trop envie, trop d'appétit, et aucun désir pour le repos : vous êtes harassés par l'envie de vivre, d'apprendre et de découvrir.
Fatigués physiquement, la tête vide, mais les jambes qui galopent, vous reprenez de temps en temps votre souffle, juste histoire de tenter dans un vain effort, de décrisper les muscles de votre dos, qui se nouent et tirent sans relâche.

Et puis il y a ces périodes où vous ne vous sentez ni particulièrement fatigué ou reposé, ni particulièrement émotif ou heureux, mais pas malheureux.
Le ciel est gris, bleu ou noir selon qu'il fait gris, beau ou nuit.
Les choses désagréables n'ont pas prise sur vous. Les choses agréables non plus.
Tout glisse, tout est lisse. Le monde est étrangement calme.

Je me sens dans cet état de passivité en ce moment. Des chose
s qui m'agacent terriblement d'habitude ne me font plus rien. Cela ne signifie pas que je sois complètement passive, mais j'ai une forme de détachement un peu désagréable parfois (j'aimerais vibrer un peu plus), franchement appréciable d'autres fois.

Je n'ai pas d'envies particulières, ni d'idées à revendre, l'écriture ne coule pas, elle rame, mon crayon de bois est sec, la mine rugueuse accroche le papier, consentant à laisser une trace sèche et peu généreuse tel un escargot à sec.
Ma tête résonne des quelques idées que j'ai eu jusqu'à présent pour mon projet de bouquin, mais, chaque fois, chaque jour, j'ai peur de m'y remettre et de me trouver confrontée au silence et à l'horizon vide de mon synopsis.
J'ai peur, je n'ai jamais eu si peur de ne pas aller au bout, de ne pas réussir à avancer, de ne pas mener à bien ce projet. Je me mets la pression, je place la barre trop haut, je ne me facilite pas la tâche.
Mais quel bonheur, tout de même, de croiser une photo d'époque, d'imaginer une réaction, de trouver une formule.
Alors je sais que tout inspiration ne m'a pas totalement dé
serté. Qu'il me faut débusquer ces quelques sursauts. Dans la collection de dunes lisses que j'ai dans le crâne en ce moment, trouverai-je bientôt ce monde que j'imagine ? Vais-je parvenir à croiser mes personnages, et à saisir l'essence qui les anime, le bois dont ils sont faits ?





novembre 23, 2009

La pudeur n'est plus de ce monde


Vous avez remarqué comme, dans le train, les gens parlent de métastases et de "Combien de temps lui reste-t-il ?"
Bon, ok, j'exagère. Mais à peine.
Jeudi soir, dans le train, une jeune fille demandait "Mais alors... il ne va pas s'en sortir ?" puis "Bon, s'il est encore là dimanche, je viendrais le voir".
Le climat dans les parages, je ne vous dis que ça. Entre le mec en face d'elle qui ne savait plus où poser les yeux et a fini par les mettre dans sa sacoche, la femme vaguement intriguée qui a fini par ôter son écouteur et moi qui envoyais un mail de mon portable, tellement je trouvais cette situation incongrue... Bon, il s'est rapidement avéré que son grand-père mourant était en fait un chien. Et que le prix de la piqûre lui a fait vraiment regretter qu'il faille en passer par là "Combien ? Quatre-vingt euros ?!"

Samedi, à la bibliothèque, je vais gentiment travailler, la personne en charge de la salle d'étude est au téléphone. Elle y reste vingt minutes. Oubliant complètement qu'il y a là des gens venus chercher le silence, la tranquillité, la concentration. Les innocents !
Et de raconter sa vie, avec force rires de gorge et exclamations. Incroyable. Je peux tout vous raconter. D'autre part, on ne sait jamais qui est autour de nous. Il s'avère qu'elle parlait de personnes que je connais, de près, très près, ou de plus loin.

D'autres personnes, dès le saut du lit, parlent déjà du repas qu'ils feront le soir, et que vous le vouliez ou non, vous êtes rapidement informé du contenu de leur bac à légumes à 8h34, alors même que vous vous laissiez gentiment emporter par votre bouquin.

Ce soir en rentrant, cette femme, au téléphone toujours "Mais bon, faut d'abord savoir si c'est métastasé ou pas métastasé..." Oui, soyons un peu pragmatiques, que diable !

Pas de repos pour les braves, la vie est là, qui ne demande qu'à être vécue et à être dite, alors n'hésitons plus, étalons, racontons, à tous vents, à tout va, nos carottes, nos métastases, nos envies, nos pourquoi et nos comment. La liberté d'expression s'exerce à chaque instant, ne soyons pas avares. Et tant pis pour nos voisins s'ils ne voulaient pas savoir.
Ils n'avaient qu'à prendre leur bagnole.
J'ai l'air de râler, mais pas du tout. Moi, les gens qui racontent leur vie, ça me distrait. D'autant que je ne suis pas la dernière à le faire, j'avoue tout. De là à étaler l'intérieur de mon frigo...

Et vous ?

ah... le silence des bois...


novembre 10, 2009

Marie Ndiaye, le prix Goncourt et le député

Je découvre à l'instant dans un article de Libération une prise de position pour le moins contradictoire.

Éric Raoult, député de Seine-Saint-Denis, estime que les propos tenus par Marie Ndiaye dans une interview donnée aux Inrocks le 30 août sont peu respectueux, voir insultants pour la France. L'auteure ayant critiqué Sarkozy et les ministres de l'immigration.

Le député imagine alors un «devoir de réserve dû aux lauréats du Prix Goncourt» et sollicite le ministre de la culture afin qu'il intervienne auprès de l'écrivaine et la remette dans le droit chemin, au motif que «le message délivré par les lauréats se doit de respecter la cohésion nationale et l’image de notre pays».

A priori, on a envie de dire qu'un prix Goncourt n'est pas une muselière. D'autant moins quand l'interview a été réalisée avant l'attribution du dit prix.

A posteriori, on est effaré (au minimum, en vrai je suis très en colère) de voir quel carcan et quel devoir de réserve certains politiques imaginent pour quiconque ose prendre la parole alors qu'il pèse un poids certain sur la scène culturelle française.
C'est ni plus ni moins de la censure.
Ce dont Raoult se défend, évidemment : «Je suis pour la liberté d’expression la plus totale des écrivains, ce qui n’est pas la liberté de calomnier ou d’insulter.»

Perso, j'adorerais être à la place de Marie Ndiaye. Je ne lui ferais pas la nique, non, je ne suis même pas sûre que je lui répondrais. Mais si j'avais à le faire, je pense que je le ferais gentiment, proprement et en réaffirmant mes convictions. Sans diffamation aucune. (Oui, je me prends pour Marie Ndiayé un instant, c'est interdit, ça aussi ?).
Qui a dit qu'un écrivain (et un artiste en général) devait donner l'exemple ? Non mais ça va pas, hein.

Et en parlant de recadrage nécessaire, je me dis qu'une petite discussion d'Homme à Homme avec ce députés'impose. Je lui collerais bien des cours de rattrapage en matière de libertés individuelles.
Un rafraîchissement s'impose. Je croise les doigts pour qu'il ait lieu.

novembre 06, 2009

Le naufrage du Titanic

En ce moment au bureau on ne peut pas dire que nous soyons débordés par la tâche à accomplir.
Nous avons plutôt le sentiment de regarder couler le Titanic en faisant les pitres.
Vous voyez l'orchestre qui continue à jouer comme si de rien était ?
En fait il serre les fesses, mais continue de souffler dans son tuba.
Ici c'est pareil : ça ricane, ça cancane, ça souffle aussi dans le tuba et l'ensemble forme un gai brouhaha, une bande-son joyeuse, façon film de copains.
Il y a bien quelques sautes d'humeur par-ci par-là, on ne coule pas impunément. Mais globalement l'ambiance n'est pas si détestable. Du moins pour ce qui concerne notre couloir.
Ailleurs... C'est une autre histoire.
Donc le matin quand j'arrive (ce matin j'ai failli manquer ma station, je suis descendue à l'horizontale, en enfonçant joyeusement mes coudes dans les cotes qui croisaient ma route et en disant "pardonpardonpardonpardonpardon". C'est la première fois de toute ma vie que ça m'arrive. Je ne sais pas quoi en penser, mmh...), quand j'arrive, donc le matin, je suis assez contente de retrouver mes compères.
On discute, on se raconte un peu des âneries, chacun endosse un rôle, un personnage, et la journée s'écoule ainsi.
Là où je vois que l'ensemble prend l'eau, c'est quand l'un me dit "je ne sais plus bien où rentrer mes heures" ou encore "ça t'ennuie si je te prends ce dossier pour faire une ligne de plus sur mon planning ?"
Là, évidemment, en être sensé, je me demande combien de temps le navire mettra à atteindre le fond.
Et je me dit qu'à ce moment, ce qui serait bien, c'est que je ne sois pas sur le pont, à regarder une murène se lover dans le tuba, vous voyez ?

J'adore les métaphores. ça change tout.

Et vous, votre navire, il se porte comment en ce moment?


novembre 04, 2009

Noir et blanc, clic et clac

J'adore le noir et blanc
J'adore les vieilles photos
Je viens d'accrocher dans mon bureau la Une d'A nous Paris qui montre un Miles Davis fragile et tout à la fois déterminé.
Il n'est pas caché derrière sa trompette. Elle ne le définit pas.
Il est juste là, sacrément là, le bonhomme.
Derrière une vraie grosse paire de lunettes mouche, une vraie présence.

Le noir et blanc, c'est pas compliqué, il a d'emblée une émotion, une force, une profondeur telles qu'on pourrait magnifier n'importe quel objet vulgaire du quotidien.
Pour peu qu'on ait un angle et une lumière, ça déchire tout, comme dirait l'autre.

Récemment je suis tombée sur un livre de photos de guerre, certaines étaient vraiment très anciennes. La distance que crée le noir et blanc est énorme. Je suis super fan aussi parce que je suis très nostalgique. Le monde en noir et blanc pour moi, c'est un monde en marge. Qui a existe, ou qui existe, mais dans lequel je ne marche pas.
Un monde dont on peut rêver, que l'on peut imaginer, mais qu'on ne vit pas. Qu'on ne vit que de l'intérieur.
Le grain, le velouté sont magiques, on pourrait toucher la matière des sujets, mais seulement en pensée.
Le noir et blanc, je vais vous dire, moi ça me transporte.

Quand je serai grande, je serai photographe de noir et blanc.



Un Bashung en noir et blanc
Une de mes photos préférées



Alain Bashung - photo : Antoine Le Grand

novembre 03, 2009

En musique

Saviez-vous que la salle Pleyel met ses concerts en ligne ?
Cela se passe sur le site, tout simplement, et pour peu que l'on ait du bon matériel, ça peut calmer un peu les tourments des jours gris et pluvieux de novembre.
On y trouve des concerts de musique classique, mais aussi de Daniel Darc, De la soul, Limousine...
Sur moi, ça a un véritable effet feu de cheminé.
Apaisant, réchauffant, enthousiasmant.

Aaaaahhh, le violoncelle sur le concert de Daniel Darc...

Quand je serai vieille (quand j'aurai du temps, mais aussi de l'arthrite, donc, je ferai du violoncelle, voilà).

octobre 28, 2009

Perdue attachée

Gare de Colombes. Les enfants s'agitent et lui demandent de choisir son dessin préféré, elle en élit trois. Je regarde mes ongles dont le vernis rouge se fait la malle. Il est temps de s'en débarrasser, et j'en ai assez. J'ai le coeur au bord des lèvres ; un détail, des broutilles, qui mis bout à bout forment une jolie chaîne de métal, de plus en plus lourde, de plus en plus longue. Je résiste, je la tire à mains nues, j'en ai connu d'autres, je m'en fait un sautoir, un peu brut, c'est tendance. Le métal rouillé grince, les maillons sont trop lourds, trop nombreux. Je la repose au sol. Que pourrais-je inventer encore pour voir la vie autrement qu'une succession de jours et de déconvenues ? Des projets, il me faut des projets. Un seul suffira peut-être. Je regarde ma chaîne, elle n'est plus si tendance, elle n'est plus que rouille. Une longue laisse rouillée devenue inutile et encombrante. il va falloir vous en séparer madame, mais rassurez-vous, vous ne sentiez rien. Je sais que c'est faux. Mais je veux croire que ça ira mieux après. Je saisis les anneaux, mes mains sont pleines de rouille ocre, je les frotte et je barbouille les apparences, la nuit n'est plus si noire. Recouverte de poussière terracota, ses ombres sont moins effrayantes et je me dis que je pourrais l'aimer ainsi.
Gare de chez moi, je descends du train, je pose le pied à terre, la chaîne grince, elle me mord la peau mais me rassure, je lui suis reconnaissante de me tenir mais je sais qu'elle me retient. J'aimerais la briser mais elle me serre, je rêve de l'ôter mais elle elle me sert. Je ne suis pas prête, pas encore, il faut attendre.
J'avance, le sol est là, la nuit, l'envie aussi, la peur, toujours. Mais moins.




Edit du 29/10 à 12:25
C'est dur, ce post, mais c'est surtout très imagé. Ne vous sentez pas obligés de dire quelque chose, ça va mieux que ça en a l'air.


Je suis juste en pleine période de doutes pro. Ce n'est pas plus grave que ça.

octobre 20, 2009

ce matin là

Ce matin-là, les yeux encore clos sur votre rêve de la nuit, vous vous réjouissez de cette journée qui s'annonce à peine.
Sans raison précise.
Peut-être est-ce ce rêve dont vous n'avez que quelques images diffuses.
Vous ne ressentez pas de fatigue, vous sentez que vous avez besoin de vous étirer, d'inspirer et de concevoir un ou deux projets emballant pour la journée qui vient.

Ce matin là, même une critique, même un reproche ne vous feront rien.
Rien.
Ils restent à ceux qui les ont formulés. Vous en tenez compte, mais ils ne vous pourrissent pas l'esprit.

Ce matin-là, le ciel est haut, coloré, sublime. Le soleil envoie du rose fuchsia, les nuages tirent le rideau et la lumière qui monte éclaire les immeubles avec une force troublante.

Dans le train, les sourires font des ricochets sur les visages ; dans votre tête le rythme est donné et ça danse. Dans votre poitrine, votre cœur bondit comme quand vous aviez sept ans et que c'était le jour de votre anniversaire.

Pourtant ce matin-là est comme tous les autres matins. Rigoureusement.
Vous le savez, vous avez couru pour arriver à l'école à l'heure, le train est bondé, c'est la grève. C'est certain, c'est un jour qui commence comme les autres.

Mais aujourd'hui, c'est comme ça : c'est un jour qui commence, et vous en avez conscience.

octobre 16, 2009

Entrée dans l'hiver, quels sont les signes ?

Le réveil s'allume, brille, brille, il peut faire ce qu'il veut, je suis dans les limbes.

J'émerge de la chaleur moelleuse de ma couette, je constate que la robe de chambre polaire, si elle n'est pas de mon âge, a ses avantages.

L'évocation de la robe de chambre en polaire me donne des frissons. A moins que ce ne soit la température de la pièce. Y'a une fenêtre ouverte ou quoi ?

Dehors, le ciel est sombre, quel temps ! Ah non, tiens, en fait, il fait encore nuit.
Je chausse mes lunettes.

Après ma douche chaude, je prends une douche glacée*, en priant que le sang dans mes veines se réchauffe avant que je mette un pied dehors.

J'enfile un manteau. Je me trouve boudinée. C'est à cause des trois pulls qui sont dessous.

Je mange toute la journée. Surtout des pommes et des fruits secs**, c'est bon pour le magnésium à l'entrée dans l'hiver.

A 11h, j'en suis à mon troisième thé brûlant. J'ai remarqué qu'à l'agence, il fait plus chaud dans les toilettes. Surtout celles de gauche.
J'envoie un mail. Il m'a fallu 23 minutes pour le taper, mes doigts gourds n'en font qu'à leur tête.

A midi on ne sort pas déjeuner. Le froid interne est si intense que le vrai froid du dehors pourrait nous tuer.
Le ciel est blanc, il va neiger.
Nous mangeons des sushis trempés dans la soupe miso pour les réchauffer.

A 16h le jour commence à décliner. J'allume ma petite lampe pour me réchauffer. Je vois ma bonne grand-mère me dire que je tue le jour. Call me la petite marchande d'allumettes.

A la 16e tasse, je remplace le café par de la tisane. Le froid m'oblige à bouger, chanter, danser pour ne pas céder au 16° qui règnent dans les bureaux.
Mes co-bureaulateurs me supplient de passer aux plantes pour leur laisser 15 minutes de calme.

A 18h j'envisage de rentrer chez moi, mais j'ai un dîner copines ce soir. Je reste seule, avec ma petite lampe, et je regarde le soir tomber.
Il est 19h, je brave le noir, la solitude et le froid pour rejoindre mes amies.
Le soir, je note de ne plus porter que des bottes. Les converses c'est mode, c'est sport et confortable, tout ce qu'on veut, mais la demi-heure d'attente dans la rue pour le meilleur Jap de la rue Sainte-Anne achève de me convaincre que l'hiver sera cuir. Ou sera froid.


* Non, je ne suis pas folle. En revanche oui, je suis un être très courageux. Je vous esspliquerai un jour pourquoi je fais ça.
** Oui, je suis une sale menteuse. Je mange surtout du chocolat et des gâteaux. Au chocolat.

octobre 15, 2009

Les contours flous de la mi-saison

Période de transition, la mi-saison donne un sentiment de répit bienvenu.

Je trouve cette mi-temps saisonnière assez réjouissante et tous les ans, je souris en constatant que les collants en laine/bottes côtoient les pieds nus pendant quelques jours, quelques semaines, c'est selon.
Tout le monde cherche ses marques et finit par s'accorder dans un bel ensemble de manteaux en laine noire pour l'hiver, et de robes légères fleuries pour l'été.

Avez-vous remarqué que la mi-saison survient toujours juste à temps ? Juste avant qu'il ne fasse trop chaud, ou quand on en peut plus de cet hiver qui n'en finit pas ?

Vous n'êtes pas d'accord ? Je peux comprendre. L'été est toujours trop court, alors que l'hiver, lui, n'a que trop duré.

Aujourd'hui, fin des contours flous de la mi-saison et entrée de plein fouet dans l'hiver.

Là d'où je viens, il fait 1° ce matin. Et j'aime que l'hiver se pointe, lui et ses promesses.

Le ciel est bleu franc, le soleil va se la donner... C'est quoi, vos projets pour cet hiver ?

Et vos doudous ? Oh allez, je suis sûre que vous avez tous un chapeau, une écharpe, qui vous tient chaud dans la traversée ardue de l'hiver.
Moi, c'est une chapka en poils de lapin, donc trèèès douce, et encore plus chaude.

Et mon projet, ben... pour le moment, j'en mitonne un ou deux, mais ça prend à peine forme, alors je peux difficilement en dire plus...
Par contre, si vous avez des lectures et des films à me conseiller sur le Paris des années 50, et sur la guerre d'Algérie, je prends !

Allez, couvrez-vous bien et dansez la vie, chantez la vie, dites merci à la vie !



octobre 13, 2009

Gla

Je dis souvent que j'ai toujours rêvé d'aller en Islande.
Ou en Finlande.
Ou au Danemark.

Aujourd'hui j'ai tellement froid que je n'arrive même pas à le penser.

octobre 03, 2009

Les chemins de l'écriture

Le temps est venu de reprendre le chemin de l'atelier d'écriture.
Mon cahier et mes stylos sont prêts. Moi... je me prépare.

J'ai longtemps hésité. J'aurais aimé m'affranchir de l'atelier, mais écrire demande de renoncer à beaucoup de choses. Le temps d'écrire est long, et se vole quand on travaille à plein temps. Il se vole au sommeil, aux enfants, au mari, aux amis, au sport, à la culture, à la lecture... Certains disent trouver un plaisir inoui dans l'écriture, au point de n'avoir aucun souci à l'imposer à son entourage. J'ai plus de scrupules.
Cette année je "vole" ce temps à mon boulot, même si le terme est très mal choisi puisque je paie ce temps que je ne passerai pas à travailler.

J'imagine les participants de l'atelier, j'imagine le groupe. J'ai un peu les jetons de les rencontrer, de leur jugement. Pas évident de s'apprivoiser, de lire ce qu'on a écrit.

La nouveauté c'est aussi que nous travaillerons sur un seul projet cette année. Je vais découvrir l'endurance, alors que je suis habituée aux textes courts. C'est bien, il est temps.

Une idée a germé, mais c'est un sujet costaud. Et peut-être qu'en commençant à écrire je partirai sur tout autre chose, ce sera la surprise.

Je n'ai pas écrit depuis que je suis rentrée de vacances, j'ai l'impression que je ne sais plus le faire.
Heureusement, l'écriture c'est comme le vélo... J'ai hâte de retrouver le chemin.


octobre 01, 2009

Mon activité rémunérée

Depuis dix ans, j'exerce une activité rémunérée dans le domaine de la communication.
Depuis 9 ans 1/2 je trouve que je n'apprends plus autant qu'en fac et cela me désespère.
Depuis huit ans, je me demande si je suis vraiment "faite pour ça". Même si je suis persuadée qu'il y a plusieurs façons d'exercer un même métier (j'ai tenté plusieurs fois d'aborder mon activité rémunérée avec plus de hauteur, plus de recul, plus d'humour, plus de cynisme, plus de sérieux même, sisi. Il faut croire que la nature reprend (trop vite) ses droits. )
Depuis huit mois, je travaille pour une cliente très cliente, comme disait un ami à moi.
Pas une hystérique, pas une méchante, mais une névrosée. Une accro au "plus parfait possible" et au mail qui vous gifle. Mais ai-je vraiment envie de parler d'elle ?

Depuis que je sais que je ne suis pas à l'aise dans ce milieu parce que je ne l'aime pas, et que je n'ai pas envie d'y réussir, je ne cherche plus de mauvaise excuse.
Je n'aime plus ce que je fais. Les compensations que j'y ai trouvé ne me suffisent plus.
J'y passe trop de temps. Ma névrosée me bouffe la rate et j'ai développé une maladie psychosomatique quand j'ai hérité de ce budget. Moi qui étais persuadée que jamais la maladie psychotruc ne passerait par moi.
Mais il n'y a pas qu'elle. Il y a aussi l'ex-collègue, passée chez le client. Qui a pris le pli tellement vite, et me rappelle fréquemment comment elle est passée de l'autre côté, elle. ça me laisse perplexe.
Et puis il y a aussi ce gentil client, qui me fait confiance, qui m'apprécie, et avec lequel j'ai des relations normales, thanks God, ça existe ! Merci à lui.

Mes clientes ne sont que des clientes, ce métier n'est qu'une activité rémunérée, et là je remercie l'adorable personne qui a mis les mots justes sur ce que j'envisageais comme "mon métier", ou "ma carrière", dans mes moments de folle exaltation.
Oui, c'est mon métier, malgré tout. Mais je ne suis pas tatouée.
Rien ne m'empêche d'aller goûter à d'autres milieux.
D'aller exercer une autre activité rémunérée. Ailleurs. Avec d'autres clients. Ou pas. Qui seront peut-être aussi très clients. Ou pas.
Rien ne m'empêche de chercher à vivre autre chose. Bon, à part la trouille.

Aujourd'hui, celle-dont-je-ne-veux-pas-parler m'a essorée.
J'ai été calme, j'ai expliqué, j'ai perdu un temps fou à être disponible pour elle. Pendant ce temps, le budget du gentil client n'a pas avancé d'un iota. Et le sien pas beaucoup plus. Elle se prend pour Don Quichotte, brasse de l'air pour faire avancer, m'envoie des mails pour faire diversion.

Je ne sais pas de quoi demain sera fait. Je suis encore devant la porte fermée.
A ne pas oser regarder par le trou de la serrure.
J'ai une trouille d'enfer.
J'essaie de sortir de la paralysie qu'elle provoque, pour oser construire autre chose.
Regarder par le trou de la serrure.
Essayer d'envisager la vie autrement.
Avec plus de plaisir. Il n'est pas interdit de se faire plaisir dans son boulot, si ?

septembre 29, 2009

Des fourneaux au blog


Je sors du cinéma où j'ai vu Julie & Julia, de Nora Ephron.

Julie, jeune trentenaire, travaille dans une société de soutien téléphonique aux victimes du 11 septembre. Un job dans lequel elle ne trouve pas tout l'épanouissement qu'elle souhaiterait. A la recherche d'une raison de se réjouir, elle décide d'ouvrir un blog dans lequel elle réaliserait 524 recettes en 365 jours. Et pas n'importe quelles recettes, les recettes du sacro-saint livre de Julia Child, la Maïté américaine des années 50.
Les deux histoires sont des histoires vraies.
En parallèle, nous suivons la vie de Julia Child, lorsqu'à 40 ans passés, elle découvre son goût pour la cuisine et se lance pour aboutir au succès que l'on connaît (puisqu'il est évoqué au début, mais je ne vais pas vous faire tout le film).

J'adore Meryl Streep, qui nous sert là une drôle de performance. La jeune Amy Adams est un peu frêle en regard, mais elle représente la jeune femme moyenne, à qui il est donné de voir sa détermination récompensée par un certain succès. Le rêve de la blogueuse en quête de reconnaissance, en somme. Je ne dévoile pas grand chose, vous n'irez vraisemblablement pas voir le film pour son suspens.
Une drôle de mise en abyme, qui boucle la boucle.
En gros, un agréable moment, drôle de surcroît. Un peu attendu toutefois.
En revanche, je tiens à souligner qu'il est fait, tout au long du film, l'apologie du beurre. De la crème, du beurre, et on se régale. ça fait un bien fou ! Vive le beurre !

Avec Meryl Streep, Amy Adams et Stanley Tucci, adapté du livre de Julie Powell.

Le blog de Julie Powell, ici, et une question posée, qui me parle beaucoup en ce moment :
Who knows how it happens, how you come upon your essential gift?

Petite parenthèse sur l'UGC Georges V dans lequel je suis allée, puisque je voulais voir le film en version originale, ce qui n'est pas donné à tout le monde, même à Paris.
50 places à tout casser, l'impression d'être assise sur le voisin d'à côté, et je pouvais à peine étendre mes jambes. Un écran minuscule, j'ai bien cru que j'allais étouffer.
Quant aux vingt minutes de publicité forcées, j'étais à deux doigts de marcher sur mes voisins pour aller mettre un taquet au projectionniste, qu'il nous le lance enfin, ce film.
Le tout pour 11 euros, qui dit mieux ?
Une véritable arnaques, j'ai donc juré mes grands dieux que je ne remettrai plus jamais les pieds dans cette salle. Bon d'accord, sous le coup de la colère, j'ai d'abord dit chez UGC. Mais soyons pragmatique, si vraiment je n'ai pas le choix je réviserais peut-être, je dis bien peut-être, mon serment. Mais rien n'est moins sûr.

septembre 25, 2009

Un certain parfum

Je la croise tous les matins.
Elle est toujours bien habillée et je hume son sillage.
Il sent ce que j’imagine d’elle, à la voir chaque jour.
La soixantaine, bien habillée, bien coiffée, un air paisible.
Je pense qu’elle a un métier valorisant, dans lequel elle est compétente.
Experte, peut-être même.
Ses vêtements laissent imaginer un certain confort financier.
Elle avance d’un pas régulier, plutôt allant.
Certains matins, elle a carrément les yeux dans le vague, l’air rêveur, un sourire flotte doucement sur son visage.
Elle me rassure, cette femme. Elle me donne une vision assez optimiste du travail à son âge.

Pourtant je ne voudrais pas être comme elle à son âge.
Je serai plus fantasque (moi qui me trouve trop classique).
Un peu plus rêveuse encore, et surtout indépendante.
Prendre le chemin de l’agence tous les matins, je le vis bien, parce que je sais qu’il me mène vers des gens auxquels je tiens, et avec lesquels je suis contente d’échanger des idées, de passer les journées.
Mais je ne me projette pas dans cette vie.
Je sais de plus en plus que j’ai besoin de gagner en indépendance, reste à en accepter les incertitudes et les risques.
Je me trompe peut-être.
On verra bien.

Je trouve ça drôle de voir comment on réussi à savoir de quoi on a envie ou ce vers quoi on tend en regardant les autres, et à travers ce que l’on imagine d’eux sans forcément les connaître.

...

Son parfum, je pense que c’est du Guerlain, de l’herba Fresca. Il faudra que je vérifie ça un de ces jours...

septembre 24, 2009

Je laisse parler ma peine
sans la retenir vraiment
je laisse filer les rênes
je me laisse aller sûrement
sentir les vagues monter
baisser le front
se faire discrète
garder pour soi
le coeur
noyé de larmes
le fer rouge
d'un sourire
la claque
d'un souvenir
Je n'ai pas toujours pu taire
il a bien fallu dire
il a bien fallu faire
aller ma peine
la faire peser
à peine

Se surprendre à sourire
Accepter de rire
vouloir sentir en soi
qu'on oublie pas
qu'il est là
être incrédule
et finalement
se demander comment
on a pu oublier

Retourner toucher
les souvenirs du bout des doigts
revenir hébété
c'est bien ça
il n'est plus là
mesurer le gouffre
mesurer la perte
ne plus vouloir dire voir ou rire
vouloir être seule

septembre 21, 2009

Hommage

Il était gentil, sensible et doué.

Il était présent.
Il était drôle et attachant.
Il était de bon conseil.
Il était à l'écoute.

Son écriture rimait, swinguait, balançait pas mal aussi.

Il était là, et il n'est plus.

J'ai du mal à le croire. Quant à l'admettre...

Si tu savais la peine que ça me fait d'écrire tout ça...



J'avais écrit quelque chose en pensant à lui il y a quelques mois.
On dira que c'est un petit hommage, modeste.
J’aurais aimé te recommander à Dieu, mais tu as toujours eu un rapport... compliqué, disons... que tu as su écrire avec humour.


Quand le corps lâche

Que se passe-t-il quand le corps lâche ?

Lâche ? Non, pas de fuite.

Pas d'échappée, belle échappée.

Juste une chute. Une chute douce,

qui dit qu'on aurait dû,

qu'on a pas,

mais qu'on devrait

faire plus attention
à nous.

Le corps lâche,

et l'esprit fuit,
l'esprit lâche
et l'esprit fut.

J'espère que tu es en paix. Je te le souhaite de tout mon cœur.

septembre 20, 2009

Three years baby !


Ma doué, je suis fiérote, cette année je suis pile poil à l'heure.
Mon entourage vous le dirait, je suis plutôt du genre à souhaiter les anniversaires le lendemain. Pile. Le lendemain. Après l'heure quoi. C'est crétin.
Ou alors c'est une façon de faire durer le plaisir... l'excuse est de taille, mais guère reluisante.
Cette année, ça m'est déjà arrivé trois fois. Je ne suis pas fière, loin de là.
Une meilleure amie appelée avec deux jours de retard ;
une filleule, appelée le lendemain ;
une meilleure amie, vue (VUE !) le lendemain, un grand moment de solitude, vous pouvez me croire.
Alors pourquoi comment, je ne me l'explique pas. Pourtant j'y pense la veille, parfois le jour même, plusieurs fois le jour même, mais j'oublie. Ce matin, c'est la première chose à laquelle j'ai pensé (après, "Pétard, un samedi, j'aurais souhaité dormir un peu plus... et nooooonnn!!!!!!, j'ai oublié de l'appeler !!!!!!)
L'horreur.
Bon. Mais là, j'y ai pensé. Un peu grâce à Yueyin, qui vient aussi de fêter ses trois ans, et à Lamousmé aussi, on est de la même année, et du même mois !

Ce blog a donc trois ans.
Trois ans de tâtonnements, d'infidélité, d'éloignements et de rapprochements.
J'envie les blogueuses régulières, celles qui ont le temps de lire tant et tant et qui alimentent ma PAL en lectures de poids, n'est-ce pas Clarabel, Fashion, Florinette, celles qui me ravissent les yeux, Marine, La trolette, Moune, celles qui nous ravissent le coeur, Le chat, Miss Zen, Bree, Lamousmé, celles qui nous secouent les puces, La femme de Georges, les chroniqueurs fous... de musique, de bouquins, thom, celles qui me font hurler de rire, Fyfe, et rire en admirant, Pénélope, Margaux, qui me font rêver de devenir illustratrice, Adolie, Alexandre... A vous tous qui me nourrissez, merci d'être là.

Je précise que je vous ai rangées dans des catégories, c'est une vilaine manie à laquelle j'essaie de remédier avec plus ou moins de succès (...), mais que vous participez tous et toutes à de multiples catégories, tant vous recelez de talents !

BON ANNIVERSAIRE CE BLOG !


Edit : vous êtes une palanquée que je n'ai pas cités, je vous aime aussi, beaucoup. Faut pas croire.

septembre 18, 2009

A demi-mots

J'ai cet air dans la tête, cette chanson mélancolique dont les paroles disent "à demi-mot", et "je m'abandonne".

Avez-vous déjà remarqué ce phénomène de la chanson qui vous parle de vous ?
Ces airs qui vous trottent dans la tête, vous collent, vous enveloppent et finalement arrivent jusqu'à votre entendement, de sorte que vous finissez par constater que vous chanter quelque chose, qui dit exactement comment vous vous sentez à ce moment-là exactement.

Donc, en ce moment, là, exactement, je m'abandonne.

septembre 14, 2009

Délit de trahison

Avant j'étais pressée d'avoir la réponse.
que ce soit oui ou non, mais que ce soit dit vite.
Maintenant... J'attends.
Résignée.
Alors même qu'une de mes histoires parle de l'importance de croire, d'y croire, en ce qui compte pour nous, je me surprend à ne pas y croire.
A ne pas croire à ce pour quoi je me suis démenée ces dernières semaines.
A ce pour quoi je nourris pourtant quelques espoirs.
J'aimerais... sans oser y croire.
Je me trouve comme une gosse, mais une gosse qui a grandit, qui a des rêves qu'elle camoufle sous une bonne grosse réalité pragmatique. Et qui n'ose pas trop les dire, pour ne pas se faire moquer.
Je me surprends à dénigrer ce que j'ai écrit "ce ne sont que quelques histoires", alors que j'aime beaucoup mes personnages.
Flagrant délit de trahison.
C'est pas beau, madame.




De ma fenêtre, un matin de la semaine dernière...
Le ciel, les nuages, une lueur de lever du jour.

septembre 12, 2009

So long... (bis)

Vous allez dire que je n'arrête pas, mais... c'est que je n'ai pas le temps d'attendre, moi. 

Une nouvelle histoire est partie, je l'accompagne de mes voeux. 

J'aimerais tellement que ça aboutisse. 



septembre 10, 2009

Relativiser

Le Figaro publie des photos prises par Hubble.

Nébuleuses, étoiles, gaz, années lumière... ça fait relativiser.
Et j'aime ça.






NASA, ESA, and the Hubble SM4 ERO Team

septembre 08, 2009

Pourquoi comment

Quand j'étais petite, je voulais être pompier. 
Puis illustratrice. Comme ma cousine. Parce que ma cousine était très belle, très cool et très douée. 
Après... je n'ai plus vraiment su. 
J'ai vu que j'étais plutôt français que maths. 
Plutôt anglais que physique. 
Puis le droit n'a pas voulu de moi. Je ne lui en veux pas. 
Les lettres en revanche, ont pris une place de choix. J'ai 
cru vouloir devenir professeur. 
Et puis finalement non. 
J'ai voulu créer des livres. 
Pas des livres de moi, il n'en était pas question. 
Des livres écrits par les autres, des livres beaux, des livres drôles, des livres avec des pages, des couvertures, du beau papier et des vernis jolis. 
J'ai finalement fait des journaux. Pas dans la presse quotidienne, ni régionale, ni féminine ni décorative ni sportive ni ni ni. 
De la presse d'entreprise. De la com, quoi. 
Je me sens moyennement  l'aise dans ce milieu, que je pratique pourtant depuis dix ans. 
Et entre-temps, j'ai croisé la route d'une jeune femme qui m'a suggéré d'écrire. 
ça a mis du temps, mais j'ai finalement essayé. Et aimé. Et recommencé. 
Et aujourd'hui, c'est mon truc à moi, mon délire, mon espoir, mon envie, mes histoires. 
Je me fais surprendre par des titres, de personnages, des prénoms, des idées, des sensations qui me demandent de les habiller, de les mettre en scène, de les raconter. 
Je me fais surprendre par un crayon qui d'un seul coup se met bille en tête à raconter une histoire complètement farfelue. Généralement, mon crayon ne va pas jusqu'au bout, et je traîne alors pendant des semaines avec cette histoire à terminer. Et puis un jour, crac, ça sort. 
C'est l'émerveillement. 
Ce drôle de phénomène qu'est l'écriture n'a pas fini de me surprendre. 
J'en ai parfois peur, mais j'accepte d'apprivoiser cette idée. 
Je sais que c'est plus facile à certains moments qu'à d'autres, et qu'écrire à partir de rien, d'un mot, d'une odeur, d'une question ne nous emmène jamais là où on s'y attend. 
Et franchement, je n'aurais jamais cru prendre autant de plaisir à me faire surprendre. 


PS. Je crois aussi que j'ai accepté le côté un peu exhibitionniste du blog... 


septembre 05, 2009

Re-rebondissement



Finalement, les éditeurs qui refusent plus vite que leur ombre existent. 

Au courrier aujourd'hui, deux lettres fort bienveillantes, dans lesquelles on apprécie la qualité de mon travail et où l'on souhaite que mon texte trouve chez un de leurs confrères la place qui lui revient.

C'est non, donc, mais c'est joliment dit. 



septembre 04, 2009

Rebondissement(s)

En rentrant ce soir, je trouve une grande enveloppe aux armes d'un éditeur de livres pour enfants. Mon coeur se serre, l'incompréhension jaillit en un flot, je suis déconfite. 

L'enveloppe est de grande taille, épaisse, ils me retournent donc mon texte. 
J'ai posté les manuscrits lundi, j'ai reçu mon exemplaire témoin mardi, comment ont-ils pu lire mon histoire, si courte soit-elle, en une journée et poster la réponse le lendemain ? 

Positive dans l'âme, je me dis que mon histoire ne vaut tellement rien qu'ils ne veulent pas en entendre parler. Voir qu'ils ne l'ont pas lue. 

J'attends une heure. Je rumine, je prends le pas sur mon inclinaison naturelle, je me regonfle, me fais à l'idée. 
Mais ça me ruine un peu ma soirée (je ne suis pas au bout de mes peines...)

Finalement... J'ouvre. 

Je découvre à la lecture du courrier qu'il s'agit bien d'un refus, mais aussi qu'il est question de l'autre histoire, celle que j'avais envoyée il y a maintenant huit mois ! 

En décembre dernier, j'ai essuyé les plâtres en expédiant en quantité confidentielle (huit éditeurs), une histoire pour laquelle j'ai beaucoup d'affection (j'affectionne mes histoires, elles le méritent bien...), mais qui ne rentre pas vraiment dans les cases classiques des bouquins jeunesse. 

D'un seul coup, je trouve que la vie est belle, que mon histoire n'est pas si mauvaise, et que ces éditeurs sont finalement consciencieux (Même si ils m'appellent "Monsieur" en en-tête de la lettre...)

Désolés de leur retard, ils concluent leur courrier en espérant lire d'autres textes de moi... 
Ils ne croient pas si bien dire...


Edit de 22h22 : si je vous dis que, quelques minutes après l'ouverture de l'enveloppe, j'ai reçu le coup de fil d'une amie. Cette amie qui relit mes histoires avec son oeil de lynx et son coeur d'experte en littérature jeunesse, si je vous dis qu'elle appelait pour me dire que, quand même, il fallait absolument que je reprenne cette histoire, envoyée il y a huit mois, pour la retravailler et la renvoyer... Vous me direz que c'est une coïncidence énorme. 
Ou un signe. 

J'aime bien les signes. 

septembre 01, 2009

Hydromel et grosses ficelles

Conseils à l’usage d’aspirants auteurs de livres pour la collection Harlequin, d’après La fiancée de l’Irlandais, de Michelle Willingham, n°448.


Je vous invite à faire un petit détour par la couverture, c'est sensuel, chaleureux, viril. Tout y est.

Le texte qui va suivre concerne la collection « Les Historiques », au descriptif prometteur : « Le tourbillon de l’Histoire, le souffle de la passion ».

Voyons, à l’aide d’un exemple (et je précise, un exemple : mes remarques ne vaudront que pour ce volume, puisque je n’en ai jamais lu d’autre, et que, a priori, je n’en lirai jamais d’autre) : quelles sont les caractéristiques les plus frappantes, et quelles grandes lignes il faudra suivre pour, telle Michelle Willingham, composer un roman au souffle brûlant de passion et d’aventure (parce que le tourbillon de l’histoire, il ne faudra pas trop s’attarder, ça n’apporte rien, si ce n’est le vertige à force de tourner en rond sur le contexte).


Choisissez un pays. Votre roman sera ainsi doté d’une culture riche et haute en couleurs.

> Dans le cas qui nous concerne, l’Irlande sera le théâtre de la passion. Des îles, des clans, des hommes rustres, qui promettent des relations âpres, sauvages et authentiques entre les protagonistes.


Choisissez soigneusement le contexte historique (même si vous n’en faites pas grand-chose par la suite, l’essentiel est d’être crédible sur la situation de départ). La guerre permet d’intéressantes combinaisons de situations toutes plus impossibles que les autres entre les différentes nations qui se combattent, et donc de remplir le contrat en matière d’aventure.

> Ici, les normands (dont la méchanceté sanguinaire est tout entière incarnée par le baron de Thornwyck, père d’Isabelle) ont envahi les Irlandais, et, afin d’asseoir son pouvoir, le baron contraint Patrick Mac Egan, son suzerain, roi de Laochre, d’épouser sa fille Isabelle, afin d’assurer sa descendance.

Le mariage forcé a ceci d’intéressant qu’il comporte dans le cas présent une nécessité de dépucelage. La grossesse peut être une contrainte d’un égal intérêt. Les deux sont ici liés, et facilités du fait du contexte historique. Car Patrick ne veut ni déflorer ni engrosser Isabelle pour ne pas céder son royaume aux Normands sanguinaires.

Nous voici donc dotés d’un enjeu de taille pour mener, de tension en allusions, notre lecteur par le bout du nez durant pas moins de 343 pages.


Choisissez des personnages, et donnez-leur les prénoms qui conviennent.

> Isabelle sera la fiancée, notez que son prénom est un premier indicateur de sa beauté, et que personne ne s’égare jamais à l’appeler « Isa ». L’Irlandais portera, quant à lui, le prénom Patrick, qui sied mieux à un Irlandais que Nestor ou Fabrice. De la même manière, personne ne s'aventurera jamais à le surnommer « Pat », d’autant moins qu’il est roi.

Les patronymes sont également déterminants pour permettre au lecteur d’identifier immédiatement les personnages. Ainsi, nous aurons un couple très prometteur composé d’Isabelle de Godred et de Patrick McEgan.


La description de vos personnages sera faite au fur et à mesure de l’avancé du récit. Vous laisserez ainsi votre lecteur libre de se figurer les traits de ses héros, en prenant soin de disséminer quelques indices au fil de la narration.

> Décrit à son arrivée comme « un géant hirsute à la cape boueuse et effrangée », on apprend que Patrick McEgan est doté d’une garde d’émaux et de pierres « fascinantes », ainsi que de « pupilles flamboyantes » toutefois « sombres comme l’ardoise ». Quant à notre héroïne, ce n’est qu’à la page 21 que nous aurons connaissance de la blondeur de sa chevelure, de la fermeté de ses lèvres, de la hauteur de ses pommettes, du brun de ses yeux et de son teint lumineux.

Le caractère et la beauté de vos personnages se disputeront la vedette. De véritables héros pourraient-ils être dépourvus de l’un ou de l’autre ? De ce point de vue, la nature de la collection est là encore déterminante. L’aventure est bien l’affaire des personnages ; choisissons une jeune femme qui se révélera dès les premières lignes hors des conventions et prête à abandonner famille et royaume pour prendre en main son destin. Je vous livre pour illustration les premières lignes de notre titre: « Quelle jeune femme n’a pas rêvé, le jour de son mariage, d’enfourcher son cheval et de fuir très loin pour échapper à son sort? » Si, comme moi, vous n’auriez pour rien au monde fuit à cheval le jour de votre mariage, vous savez déjà que vous ne vous identifierez pas nécessairement au personnage principal. Ce n’est pas grave. Une héroïne Harlequin peut se permettre de ne pas ressembler au tout venant, c’est même souhaitable pour les aventures qui l’attendent, mais n’anticipons pas.


Lancez votre premier chapitre sur les chapeaux de roues : un mariage, une fiancée qui n’a jamais rencontré son promis, et craint fort de se trouver face à « un vieillard édenté ». Veillez à ce que la représentation que la belle se fait de son fiancé frappe l’imagination du lecteur. Savoir que, dans une telle situation, vous craindriez beaucoup plus de tomber sur un imbécile heureux importe peu. Même si il est vrai que l’imbécillité, aussi heureuse soit-elle, dure beaucoup plus longtemps que l’espérance de vie d’un vieux gâteux.

Frapper l’imagination du lecteur sera du reste votre préoccupation la plus vive.

Le premier chapitre sera donc le chapitre de première rencontre entre les fiancés, celui du mariage et du départ de la belle pour son nouveau royaume.

Le second chapitre peut être un peu plus léger, ainsi nous apprendrons majoritairement du second chapitre qu’Isabelle craint les rats.


La suite de l’intrigue sera peuplée de questions. Nos aventuriers progressent dans la connaissance l’un de l’autre, ils se tournent autour, se reniflent « Ses cheveux sentaient la femme », et s’interrogent beaucoup « Pourquoi ses seins semblaient-ils se durcir ? ».

Ils seront attirés chacun à différents moments de l’histoire, nous aurons ainsi l’occasion de détailler, sous de multiples angles, et à différentes reprises, les muscles et la virilité du héros, les courbes, sous un vêtement mouillé, de préférence, de l’héroïne. Du reste, une partie du corps peut suffire à quelques sous-entendus. Ainsi les mains de Patrick sont : « Très grandes et très fortes, elles dénotaient une remarquable vigueur ». Pour la jeune femme, quelques allusions subtiles la compareront tour à tour à une pouliche (p.10), à un animal sauvage qu’il s’agit de dompter (p.18), à un étalon (p.20) etc. Michelle va jusqu’à écrire que Patrick jette à la miche (de pain, ndlr.) des regards concupiscents. En résumé, n’ayez peur d’aucun cliché, ils vous le rendront bien.

Collection aventure donc. L’héroïne a de la chance. Têtue, limite pénible (c’est une femme, elle est blonde, elle ne veut pas comprendre), intrépide, il est bon qu’elle ait ce petit côté Jack Bauer qui lui permettra d’échapper à la mort quand elle traversera à la nage l’eau glaciale du Gouffre, dont elle se demande, en dernière extrémité « Dans ses abîmes, les noyés des temps anciens ne l’attendaient-ils pas, en ricanant ? ».

Cette épreuve lui conférera le statut d’héroïne, comme le constatera notre héros Patrick au chapitre 7 « Son allure était celle des intrépides guerrières de légende ».

C’est alors que tout bascule, elle est normande, mais pas moins femme, il est irlandais mais sacrément homme, si en plus elle est belle, têtue, guerrière, après des mois d'entêtement pour se faire accepter, il suffit d’une petite pression supplémentaire du père, et paf, à la page 247, leur sort est scellé, il la déflore. Avec beaucoup de remords. Ils connaîtront encore un ou deux soucis matériels, puis vivront le reste de leur vie en tant que roi et reine, la tête haute, la voix rauque, les muscles bandés et tutti quanti.

Pour ce qui est du vocabulaire, n’hésitez pas à adopter des termes recherchés, qui enrichiront avantageusement le propos. Par exemple au pays d’Harlequin, les personnages ne boivent pas, ils « s’octroient une large rasade d’hydromel », et sont des « parangons de virilité ». En revanche, le lecteur n’a pas besoin de connaître le terme exact qui désigne la langue des irlandais de l’époque, il suffira d’écrire que les femmes « parlaient dans leur langue », tout le monde comprendra.


N’ayez pas non plus crainte de vous répéter. Le lecteur est oublieux, il peut être bon, au début d’un chapitre, de résumer l’enjeu du roman, on ne sait jamais. Ou de redire combien les deux protagonistes ont été violemment attirés l’un par l’autre trois pages auparavant. C’est la technique du réchauffage de braises. De même, les sous entendus doivent êtres clairement énoncés « Par son intimité comme par la puissance de sa pénétration, cette prise de possession était comme la figuration de celle que Patrick s’interdisait. »

Quant aux formulations, elles seront de préférence compliquées, négatives, on décrira avantageusement ce qu’un personnage n’est pas, plutôt que d’écrire tout simplement ce qu’il est.


Enfin, ne lésinez pas sur les fins de chapitres qui, en une phrase simple et percutante, informeront le lecteur de l’état d’esprit dans lequel il laisse son personnage. Ainsi, malgré l’adversité, Isabelle songe, au terme du chapitre premier « Il ne fallait pas que son mari, si inquiétant qu’il fut, soit dévoré par une meute de loups » ; fin du chapitre 6 « D’un geste rageur, elle fit tomber la grande cape. » ; chapitre 7 « N’y tenant plus, elle lui prit la bouche » ; et ma préférée « La folie allait s’emparer d’elle, sans doute, mais quand ? » (chapitre 22).


Vous l’aurez compris, il y a beaucoup à dire sur un Harlequin. Je m’en tiendrai donc là. En espérant que vous aurez eu un aperçu du plus drôle de ma lecture.

Pour le moment, je n’ai encore pas réussi à ouvrir un autre livre depuis que j’ai fini celui-ci.

Traumatisée par tant de talent, sans doute.

Une très bonne, et très drôle critique du même ouvrage chez Cryssilda.


Billet écrit dans le cadre des Harlequinades 2009.