novembre 23, 2006

La promesse de l'aube


Je suis dans La promesse de l’aube, de Romain Gary

Romain Gary qui n’a de cesse de raconter sa vie d’enfant unique d’une mère délaissée et totalement dévouée à l’œuvre de sa vie : lui.
Ainsi décrit-il l’amour maternel exclusif. Je dois dire que je n’ai pas vécu cet amour enfant, mais que devenue maman, je me suis trouvée riche de cette source qu’il décrit, et que j’appelle moi mon « puit sans fond d’amour », qui fait parfois peur, qui déstabilise, mais qui tient tellement chaud au cœur. Je partage avec vous :


« Ce fut seulement aux abords de la quarantaine que je commençai à comprendre. Il n’est pas bon d’être tellement aimé, si jeune, si tôt. Ça vous donne de mauvaises habitudes. On croit que c’est arrivé. On croit que ça existe ailleurs, que ça peut se retrouver. On compte là-dessus. On regarde, on espère, on attend. Avec l’amour maternel, la vie fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu’à la fin de ses jours. Après cela, chaque fois qu’une femme vous prend dans ses bras, vous serre sur son cœur, ce ne sont plus que des condoléances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné. Jamais plus, jamais plus, jamais plus. Des bras adorables se referment autour de votre cou et des lèvres très douces vous parlent d’amour, mais vous êtes au courant. Vous êtes passé à la source très tôt et vous avez tout bu. Lorsque la soif vous reprend, vous avez beau vous jeter de tous les côtés, il n’y a plus de puits, il n’y a que des mirages. Vous avez fait, dès la première lueur de l’aube, une étude très serrée de l’amour et vous avez sur vous de la documentation. Partout où vous allez, vous portez en vous le poison des comparaisons et vous passez votre temps à attendre ce que vous avez déjà reçu.
Je ne dis pas qu’il faille empêcher les mères d’aimer les petits. Je dis simplement qu’il vaut mieux que les mères aient encore quelqu’un d’autre à aimer. Si ma mère avait eu un amant, je n’aurais pas passé ma vie à mourir de soif auprès de chaque fontaine. Malheureusement pour moi, je me connais en vrais diamants. »

novembre 17, 2006

Une présence à exploser l'objectif

En parlant de force et de fragilité, je pensais tout particulièrement à ces deux photos. Elle est éblouissante sur la première. Ultra émouvante sur la deuxième.


J'ai un faible

pour les photos de dos



J'y vois autant de force que de fragilité

novembre 16, 2006

L'ombre de moi-meme

Y’a des jours comme ça où on est l’ombre de soi-même.
Le réveil ne vous agresse même pas : vous ne l’entendez pas.
Ma première pensée fut « On est quoi ? jeudi. QUE jeudi noooooooooon ! Au secours ! » Ensuite on se met sous la douche, ça ne fait rien de plus que vous mouiller. Même froide. Mais là encore vous ne réalisez pas qu’il y a un souci. Puis café, enfant, école « Je veux rester avec toi à la maison ». Vous pensez « Oui, moi aussi, chérie, moi aussi », imaginant un instant le bonheur sans limite que serait une grasse mat’ au lit avec un café et un bouquin, mais vous dites « mais non, ma chérie, ta place est à l’école, avec tous tes copains qui t’attendent, là, regarde ! » Trente paires d’yeux nous entourent en effet, puis quelques réflexions fusent « qu’est-ce qu’elle a ? » « Elle veut peut-être rester avec toi » me suggère une brunette à couettes (...)
Le petit matin n’en finit plus de vous bousculer avec son cortège d’horaires qui se suivent sans vous laisser de répit. Les gens vous poussent, vous pressent, vous dépassent, vous envahissent.
À la boulangerie, je laisse passer une bonne femme (y’a pas d’autre mot), « Je suis pressée !!!! ». Je préfère la laisser faire son show devant moi que de la sentir piailler et trépigner pendant que je cherche des sous dans mon sac sans fond (vous voyez le cabas de Mary Poppins ? Je suis sûre qu’avec un peu de concentration, je pourrais comme elle extraire de mon sac un porte-manteaux, un miroir ou une plante verte). Bref, elle est tellement pressée, la Bonne-Femme, qu’elle met dix minutes à acheter ses trois croissants. C’est normal, je lui ai laissé mon tour, il est tout naturel qu’elle en jouisse à son aise sans que je proteste, et puis j’avoue, je n’ai pas envie, ça me passe au-dessus du crâne : je suis à l’ouest.
Vous arrivez au bureau martelé, roué, contusionné ; le téléphone prend le relais, des questions, des réponses, des choses à relire, des gens, partout, encore. Des vannes, plus ou moins drôles (un open space de dix personnes n’est pas une situation toujours facile à vivre, je ne vous apprend rien).
Ce midi un médecin me conseille de tuer quelqu’un « Faites-le, vous verrez, ça soulage ». Qu'est-ce qu'il dit ?
Je n’émets aucune objection, j’y avais bien pensé avant qu’il me le suggère. Mais ce n’est pas parce que les gens sont cons que ça m’autorise à les tuer. J'ai expliqué ça il n'y a pas longtemps à ma poulette. Je dois m'y tenir.
Bref, après une course de vitesse d’une heure quinze pour cinq minutes de rendez-vous, je suis enfin réveillée pour attaquer une après-midi qui sera certainement fascinante.
Je trouve ça impossible de raisonner en se disant "Et demain quoi ? Demain pareil. Sauf qu'on sera vendredi."
Non, je ne trouve ça pas possible.

novembre 14, 2006

Littéralement happée

Ce matin j'ai littéralement plané sur cette chanson d'Alain Bashung.
Un morceau de ciel bleu au bout des yeux et je flottais dans la rue

Tu vois ce convoi
Qui s’ébranle
Non tu vois pas
Tu n’es pas dans l’angle
Pas dans le triangle

Comme quand tu faisais du zèle
Comme quand j’te volais dans les plumes
Entre les dunes

Par la porte entrebâillée
Je te vois rêver
A des ébats qui me blessent
A des ébats qui ne cessent

Peu à peu tout me happe
Je me dérobe je me détache
Sans laisser d’auréole
Les cymbales les symboles
Collent
On se rappelle
On se racole
Peu à peu tout me happe

Les vents de l’orgueil
Peu apaisés
Peu apaisés
Une poussière dans l’œil
Et le monde entier soudain se trouble

Comme quand tu faisais du zèle
Comme quand j’te volais dans les plumes
Entre les dunes

Par la porte entrebaîllée
Je te vois pleurer
Des romans-fleuves asséchés
Où jadis on nageait

Peu à peu tout me happe
Je me dérobe je me détache
Sans laisser d’auréole
Les cymbales les symboles
Collent
On se rappelle
On se racole
Peu à peu tout me happe

novembre 09, 2006

Kressmann Taylor, la sensitive










Kathrine Kressmann Taylor
(1903-1997)

J'ai rencontré Kressmann Taylor dans un supermarché du Nord.
Je ne suis pas fan des livres au supermarché, mais là, je suis littéralement tombée en arrêt sur la couverture de son recueil intitulé « Ainsi rêvent les femmes », qui réunit quatre nouvelles dont les personnages débordent d'émotions.
Son écriture est riche, douce, émouvante. Elle donne le sentiment de quelqu'un d'une grande bonté, et d’une profonde sensibilité.
Je ne parlerai pas du gros succès de Kressmann Taylor Inconnu à cette adresse, parce que j'ai choisi de me concentrer sur ces deux recueils de nouvelles.

Dans la première nouvelle, Harriet rêve, justement. Mais de ces rêves qui mêlent si finement des éléments absurdes à la réalité qu’on perd tout à fait pied. Ici, nous savons et ressentons l'essentiel de ce que vit cette femme, en cinq petites pages. Je trouve ça magique.

« - Il faut que tu regardes ma nouvelle machine à faire les boutonnières, dit Leila. Tu n'as jamais rien vu de tel. Harry m'achète toutes les machines dont j'ai envie.
Et elle se mit à fabriquer des boutonnières à toute allure, l'une après l'autre.
Harriet gardait les yeux fixés sur cette course de boutonnières, mais entre ses côtes, une crainte froide commençait à se répandre. Tout à coup, son cœur cessa de palpiter dans sa poitrine, transi par un intolérable élancement de douleur glacé. Elle savait presque, mais luttait contre ce qu'elle savait. À ce moment-là, les flammes jaillirent au pied des murs et les yeux de Leila laissèrent échapper leur secret. Des yeux avides, satisfaits et nus. »


Dans ces quatre histoires, chacun des acteurs (car le dernier est un homme) vit un rêve. Une vie rêvée, un rêve de vie, qui prend corps ou non. Toujours est-il que la délicatesse de ses descriptions dessine chaque décor et chaque personnage avec précision, et souvent en lien avec la nature. Par exemple dans la seconde nouvelle, où une adolescente est confrontée à sa mère :
« Sa mère la connaissait par cœur, savait immédiatement ce qui lui conviendrait. Anna se disait : « Je ne mérite pas une mère comme elle, elle est trop indulgente avec moi, je deviens capricieuse et gâtée. » La voix de sa mère lui parvient de l'autre côté du corridor.
- N'oublie pas de mettre tes chaussures avant de descendre.
Aussitôt tout fut gâché, sa gratitude s'envola « Si seulement Maman me permettait d'être moi-même, ne serait-ce que dix minutes ! »
Voilà le problème en fait, sa mère arrangeait trop les choses. Elle ne laissait rien au hasard, elle imposait à tout un ordre agréable et convenable. « Je me demande s'il lui arrive de voir jusqu'aux ténébreux abîmes qui se profilent derrière les apparences, de faire face à l'effroyable, à l'insupportable fin de tout. Elle ne comprend pas que la blancheur des pivoines fait peine à voir car elle doit finir un jour. Il y a dans le monde quelque chose qui ne va pas du tout. Regardez ce qui dure, les tombes, par exemple. Ce sont les belles choses qui disparaissent en premier : les matinées comme celles-ci, les iris qui cachent à l'intérieur de leurs pétales des cavités mouchetées et duveteuses. »

Comme je restais sur ma faim, je me suis avidement jetée sur le pendant de ce volume
« Ainsi mentent les hommes ».

Les femmes rêvent, les hommes mentent, pourquoi pas. Je précise toutefois que les nouvelles ont été ressemblées en volumes par l'éditeur, alors qu'elles étaient pour la plupart, parues séparément dans des magazines féminins ou des quotidiens américains dans les années 50.
Ici les mensonges dont il est question dans le titre sont autant de trahisons ou de fuites, qui ont pour principale conséquence de faire souffrir les personnes aimantes de l'entourage.

Le petit Richard vit la semaine en compagnie de sa mère. Son père est représentant, et nous assistons à son retour à la maison pour le week-end. Ce dernier se croit obligé d'imposer son autorité de père de famille en redressant l'éducation de son fils supposément négligée par la mère. Et c'est elle que Richard va trahir. Son mensonge consistera à accepter cette autorité afin d'entrer dans les faveurs paternelles, cela au détriment de sa mère, qui par voie de conséquence passe pour être trop faible avec son garçon. Heureusement cependant, leur relation ne se résume pas à cela.
« - Je t'ai demandé ce que tu faisais de bon à l'école, répéta la voix de l'homme.
- Oh ! ça va, dit il. Je pense que ça va.
- Tu penses ? demanda froidement son père. Tu n'en es pas sûr ?
- Si papa, je travaille bien. »
Sa gorge se serra aussitôt jusqu'à l'étouffement, et il eut la sensation qu'il allait vomir, parce que le visage de son père était devenu dur, comme près à le punir ; la magie de cette journée était brisée, et c'était sa faute à lui, Richard. Désespéré, il vit son père diriger son regard sévère vers sa mère.
« - Si je te laisse trop longtemps toute seule avec le gosse, tu m'en feras une femmelette. Ça te plairait, ça hein ? » dit-il avec amertume.
Richard comprit alors que sa mère allait les sauver. Elle ne prit pas l'air humble, craintif, replié, qu'elle avait habituellement lorsque le père lui parlait ainsi. Ses yeux gardèrent leur éclat joyeux, sa bouche forma une moue charmante, et elle éclata de rire. Le visage de son père devient rouge et content, il l'attira de nouveau contre lui et couvrit ses lèvres d'un long baiser persistant. Simplement, sa mère ne s'abandonna pas à cette étreinte comme elle avait pu le faire dans le jardin. Elle offrait sa bouche, mais ses épaules étaient tendues, ses mains étaient deux poings crispés tombant le long du corps au lieu de s'étaler avec bonheur sur le dos de son mari. Elle les avait sauvés, mais elle avait honte ; elle souffrait. Le petit garçon, s'accrochant éperdument aux vestiges de cette journée, qui durait encore, qui se poursuivait malgré tout, était trop soulagé pour s'en inquiéter. »

Cette scène n'est que le début, mais rassurez-vous, si Richard ne défend pas sa mère, et laisse par la suite son père lancer des répliques du meilleur goût « C'est ça les bonnes femmes, on ne peut pas leur demander d'avoir de la jugeote. », voire s'y associe, la complicité qu’il partage avec sa mère n'en sera pas effacée pour autant. (De là à dire qu'elle en sortira intacte, il ne faut pas pousser, mais l'amour fait des miracles.)

Enfin, la dernière nouvelle de ce volume réunit deux femmes, une jeune et une usée, je dirais. C'est je crois la plus touchante de toutes ces nouvelles, et je résisterais au plaisir de vous faire lire le dernier paragraphe car il prend tout son sens au terme de la lecture de ce petit texte.

Si vous avez besoin d'un peu de douceur et de délicatesse en ce début de frimas, je vous recommande la lecture de ces textes délicats comme tout.

novembre 08, 2006

Le retour de la question existentielle... ou Chronique d'une coïncidence

Et si je recrutais en ce moment des relecteurs et que je recevais le CV d'une personne qui indique avoir relu les épreuves d'un livre, succès récent de chez Gallimuch, qui a pour caractéristique d'être le livre le plus riche en fautes d'accord que j'ai jamais lu.
Cf. cette note
Est-ce que je trouve cette référence rédibitoire, au point de ne pas donner suite, ou est-ce que je tente le coup, en comptant sur le fait que les fautes ont peut-être été intégrées après sa relecture.
Est-ce seulement probable ?
Peut-être.
Je m'interroge.
Et je n'en reviens pas de cette coïncidence.



novembre 07, 2006

A l'heure de la nuit

La nuit envahit nos jours
Heureusement que certaines fleurs éclairent encore l'automne...



La multiplication des lapins

Il y a de cela quelque temps,
Je fus accueillie sur la souche d'une trolette,

c'est là

qui parmi mille autres beautés
faisait de ses mains, des origapins
jolis

sur une idée brillante de la non moins accueillante
lilfairy
dont le tuto suit
ici


C'était si beau que mes doigts n'y tenant plus
j'ai fait de même pour ma maison à moi
Et voici ce qu'il arriva
les lapins dans ma maison
sont devenus lumignons !








Merci à La Trolette et à lilfairy de nous permettre de partager toutes ces beautés...
Je suis rose de plaisir !